Tout allait bien, jusqu'à ce qu'elle tombe gravement malade. Au début, tout était bénin, d'ailleurs Alicia tombait rarement malade. Cela commença par une gorge qui gratte, un petit rhume, qui prit de l'importance, puis une montée de fièvre fulgurante la prit. Ses parents qui n'avaient pas l'habitude de s'inquiéter pour tout ça se décidèrent à appeler le médecin. Celui-ci passa au domicile familial mais ne put identifier l'origine du mal et put seulement lui prescrire des antibiotiques.
Les jours passaient, Alicia restait au lit, ne pouvant pas bouger à cause de cette fièvre qui lui prenait toute son énergie. Il lui était aussi impossible de se concentrer sur quoi que ce soit, les journées étaient donc longues et éprouvantes, seul la fin d'après-midi la soulageait un peu, lorsqu'une ou deux de ses amies passait la voir. Elle manquait de force mais ne pouvait rien engloutir, elle n'avait pas faim malgré son estomac qui se manifestait, mais surtout, la moindre chose qu'elle avalait la faisait vomir, ce qui faisait encore un symptôme supplémentaire. La seule chose qu'elle pouvait faire, c'était de boire de l'eau à longueur de journée, rien d'autre ne passait. Après tout, vu la quantité d'eau qu'elle perdait en suant à cause de sa fièvre était effrayamment importante.
De jour en jour, ses parents se faisaient plus inquiets. Et quand il devint évidant pour eux qu'un séjour à l'hôpital allait être obligatoire, un événement se produisit : Alicia, vide de toute force, souhaitait seulement changer de position dans son lit, mais alors qu'elle levait simplement le bras, elle le vit se prendre une position anormale. D'abord le poignet, qui se tordit plus qu'à l'accoutumé, mais surtout le mouvement lent de son avant bras se pliant comme si ses os n'existaient plus qu'il était attiré par l'attraction terrestre. Alicia s'arrêta de respirer un instant, prise de panique, tremblante de tout son corps, hurla d'effroi. Quand son père, qui s'était libéré ce jour là pour la garder, arriva à son chevet, elle était dans la même position, en train de pleurer. Il ne pouvait pourtant pas vraiment distinguer les larmes sur ses joues car celles-ci étaient devenues translucides.

L'état d'Alicia devenait invivable pour toute la famille. Ses parents avait continuellement peur qu'elle ne disparaisse, d'une façon ou d'une autre. Le fait d'être totalement impuissants n'était pas en rien dans leur craintes. Que devaient-ils faire ? Appeler les urgences ? Bien entendu, ils n'étaient pas bêtes, tous avaient compris qu'il y avait un lien avec ces histoires de paranormal dont on entendait de plus en plus souvent parler. Alors est-ce qu'il était réellement envisageable de prévenir l'hôpital sachant les problèmes supplémentaires que cela produirait ? Mais il était aussi difficile d'admettre que les services sanitaires ne pouvaient rien pour leur fille et malgré de très longues hésitations, ils décidèrent de n'alerter personne et de s'occuper d'elle au mieux.

Pourquoi cette chose lui arrivait à elle ? Personne n'était en mesure de le lui expliquer de toute façon vu qu'apparemment personne n'était capable d'expliquer l'origine du phénomène lui-même. Alicia avait bien conscience que ses parents se demandaient s'ils étaient pour quelque chose dans sa transformation, que ce soit dû à la génétique, peut-être même à ce qu'elle avait mangé ou par rapport à la pollution présente dans le quartier. Difficile de ne pas imaginer tout et n'importe quoi dans un tel cas.
Elle, de son côté, se demandait surtout si elle allait mourir, si elle allait être condamnée à rester au lit toute sa vie et coupée du monde comme une pestiférée. Parce que bien entendu, il n'était plus question que ses amies viennent lui rendre visite. Son présent était horrible et elle ne savait même pas si elle allait avoir un futur. Bien sûr, il y avait des hauts et des bas, des fois, elle reprenait une forme humaine quasi normale, mais autant elle avait peur de ne pouvoir plus rien faire dans la vie, autant elle avait peur de se lever, même s'il s'agissait seulement de se rendre au toilettes. Allait-elle seulement réussir à se lever ?

Les mois passaient et leur vie avait totalement changé : ses deux parents avaient choisi de ne travailler qu'à mi-temps pour s'occuper d'elle, même s'ils n'y pouvaient pas grand chose. Ils l'avaient retiré de l'école, accusant une santé faible depuis sa maladie et l'avaient inscrite à des cours par correspondance. Ils avaient également investi dans une seconde télévision couleur pour l'occuper et lui offraient sans arrêt des livres.
Peut-être auraient-ils préféré qu'elle devienne insupportable à les envoyer balader plutôt que de la voir dormir douze heures par jour et rester calme et sans une émotion plus haute que l'autre. Elle semblait avoir totalement perdu goût à la vie.